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Détention provisoire ordonnée à la suite d’une révocation du contrôle judiciaire et motivations

Pénal - Procédure pénale
29/01/2021
La Cour de cassation, dans un arrêt du 27 janvier 2021, revient sur la motivation attendue par la chambre de l’instruction pour la décision de placement en détention provisoire prise pour sanctionner l’inexécution par le mis en examen des obligations du contrôle judiciaire.
Un homme mis en examen a été placé en détention provisoire puis libéré sous contrôle judiciaire avec diverses obligations. Quatre mois plus tard, le juge d’instruction saisit le JLD aux fins de révocation du contrôle judiciaire. À la suite du refus de ce dernier, le procureur de la République interjette appel.
 
La cour d’appel infirme l’ordonnance du JLD et ordonne la révocation du contrôle judiciaire de l’intéressé et son placement en détention provisoire. Il aurait violé à de nombreuses reprises l’interdiction de se rendre dans certains départements et à l’étranger. Il aurait reconnu et expliqué avoir agi pour des motifs familiaux. Néanmoins la cour note qu’il n’a pas justifié de la maladie alléguée de son fils « et qu’il ne saurait être reproché au magistrat instructeur d’avoir tardé à répondre à sa demande de modification des obligations du contrôle judiciaire pour justifier son comportement transgressif ».
 
Elle affirme que la décision de placement en détention provisoire prise pour sanctionner l’inexécution par la personne mise en examen des obligations du contrôle judiciaire n’a pas à être motivée en application de l’article 144 du Code de procédure pénale.
 
Après un pourvoi formé par l’intéressé, la Cour de cassation valide la position des juges du second degré. 
 
Le demandeur reproche notamment à l’arrêt de ne pas s’être assuré que les conditions légales de la détention provisoire étaient réunies, et notamment l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de la personne mise en examen aux faits reprochés. La cour d’appel aurait ainsi violé l’article 5 1.c de la CEDH.
 
La Cour de cassation rappelle alors les éléments suivants :
- il résulte des articles 80-1 et 137 du Code de procédure pénale que « les mesures de sûreté ne peuvent être prononcées qu’à l’égard de la personne à l’encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elle ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont le juge d’instruction est saisi » ;
- et il se déduit de l’article 5 1.c de la CEDH que la chambre de l’instruction doit s’assurer, à chacun des stades de la procédure, même d’office, que les conditions légales des mesures de sûreté sont réunies, « en constatant expressément l’existence de tels indices ».
 
Néanmoins, la Haute juridiction précise que ce contrôle, propre à la matière des mesures de sûreté, « est sans incidence sur la validité de la mise en examen, laquelle ne peut être critiquée que dans le cadre des procédures engagées sur le fondement des articles 80-1-1 et 170 du Code de procédure pénale ». Ainsi, l’obligation de constater l’existence d’indices graves ou concordants cesse, sauf contestation, en cas de placement en détention provisoire sanctionnant des manquements volontaires aux obligations du contrôle du contrôle judiciaire. À défaut de contestation, « un tel placement en détention provisoire ne doit être motivé qu’au regard des manquements de la personne à ses obligations ». 

Elle affirme également que « dès lors qu’elle a caractérisé l’existence d’un manquement entrant dans les prévisions de l’article 141-2 du Code de procédure pénale, et souverainement estimé qu’il devait donner lieu à révocation du contrôle judiciaire, la décision de placement en détention provisoire prise pour sanctionner l’inexécution par la personne mise en examen des obligations du contrôle judiciaire n’a pas à être motivée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences de l’article 144 du même Code ». La Cour de cassation a déjà tranché en ce sens (Cass. crim., 13 oct. 1998, n° 98-84.260). 

Le pourvoi est donc rejeté.
 
 
Source : Actualités du droit