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Visite des navires de l’article 63 du Code des douanes : cas d’annulation du PV

Affaires - Pénal des affaires
Transport - Douane
04/01/2023
À défaut d’une « suspicion de fraude » mentionnée sur le procès-verbal de visite d’un navire, cette visite fondée sur le seul article 63 du Code des douanes doit être annulée, selon un arrêt de la cour d’appel de Rouen du 9 décembre 2022. Celle-ci motive aussi l’annulation de ce PV de visite – et celle du PV de constat subséquent qui en « dérive » – sur le fait que, s’agissant de la visite des parties privatives du navire, ce procès-verbal de visite ne mentionne ni que le capitaine du navire, occupant des lieux, a été informé du cadre de la visite du navire, ni qu’il n'a formulé aucune observation pour la refuser.
Suspicion de fraude : mention sur le PV
 
Pour mémoire, l’article 63 du Code des douanes dispose que « Pour l'application du présent code et en vue de la recherche de la fraude, les agents des douanes peuvent accéder à bord et visiter tout navire qui se trouve dans un port, dans une rade ou à quai ».
 
Pour le juge, il résulte de ces dispositions, que la visite d'un navire par les douaniers « en application des seules dispositions de l’article 63 du code des douanes (...) doit être fondée sur une suspicion de fraude ». Aussi, « saisi du recours de l'occupant des lieux, le juge d'appel doit être en mesure de contrôler ne serait-ce que par les seules énonciations du procès-verbal que la visite du navire s'inscrit bien dans cet impératif ». Or, en l’espèce, le PV de visite du navire ne fait aucune référence à une suspicion de fraude et les dispositions de cet article 63 ont « manifestement été détournées de leur objet pour justifier la visite des parties privatives du navire à des fins autres que la recherche d'une infraction douanière ».
 
Parties privatives du navire : mention sur le PV de l’information préalable et de l’absence d’observation
 
L’article 63 dispose aussi que « Lorsque la visite concerne des navires qui se trouvent dans un port, dans une rade ou à quai depuis soixante-douze heures au moins, elle se déroule en présence du capitaine du navire ou de son représentant » et que « Lorsque la visite concerne des locaux affectés à un usage privé ou d'habitation, elle ne peut être effectuée, en cas de refus de l'occupant des lieux, qu'après autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure. La visite s'effectue sous le contrôle du juge qui l'a autorisée ».
 
Pour le juge, en l'absence de mentions en ce sens portées au procès-verbal de visite, le capitaine du navire, alors occupant des lieux, n'a pas été informé du cadre dans lequel était réalisée la visite du navire, et il n’a manifestement été informé qu'à l'issue des opérations de visite du navire que ce dernier se voyait appliquer une mesure de gel. Et si, selon la Douane, le capitaine n'a formulé aucune observation, « cette affirmation ne se déduit pas du procès-verbal qui ne ménage en son économie aucun espace pour recueillir d'éventuelles observations et ne porte aucune mention en ce sens ». Il en résulte, en l’absence d'information préalablement donnée au capitaine quant au but poursuivi par les douaniers, que celui-ci « n'a pas été en mesure d'apprécier de façon éclairée s'il devait s'opposer à la visite des parties privatives du navire, n'a pas été informé qu'il pouvait s'y opposer, et que ce refus entraînerait un contrôle du juge des libertés et de la détention ». Par conséquent, « la méconnaissance de ces formalités substantielles a nécessairement porté atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne », en l'espèce le propriétaire du navire qui a intérêt et qualité pour agir en nullité du procès-verbal de visite. Nullité qu’il obtient d’ailleurs comme celle du PV de constat subséquent visant le gel de ses avoirs, le juge retenant – sans doute avec humour s’agissant d’un navire – que ce PV de constat, faisant suite à la visite du navire objet du PV de visite annulé et « dérivant » de celui-ci, trouve son support exclusif et nécessaire dans le procès-verbal de visite annulé.
 
 
Source : Actualités du droit